L’affaire du supposé « coup d’État » impliquant Olivier Boko et Oswald Homeky continue de faire couler beaucoup d’encre. Lors d’une récente intervention, Me Ayodele Ahounou, avocat d’Olivier Boko, un des accusés a dénoncé des vices de procédure qui compromettent gravement la crédibilité de l’instruction menée par la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET). Ces irrégularités, selon lui, soulèvent des questions fondamentales sur l’indépendance de la justice au Bénin et la possibilité d’un procès équitable.
Parmi les dysfonctionnements relevés par Me Ahounou figure la manipulation des dossiers de l’instruction. Les avocats de la défense ont reçu une version qui diffère de celle étudiée par les magistrats instructeurs. Cette situation constitue une entrave majeure à leur capacité de défendre leurs clients, car la loi exige que le dossier transmis aux avocats soit identique à celui examiné par les juges. De plus, certains avocats de l’équipe de défense n’ont même pas été invités à consulter le dossier, ce qui viole les règles élémentaires de procédure et limite leur préparation.
Autre fait marquant : le rejet d’une exception d’inconstitutionnalité soulevée par la défense. Selon le code de procédure pénale, une telle exception doit être renvoyée devant la Cour constitutionnelle pour examen. Pourtant, à la surprise générale, la CRIET au Bénin a décidé de ne pas transmettre cette demande, rendant immédiatement une décision sur le fond. Me Ahounou a qualifié cette démarche d’« inédite et contraire à l’État de droit », rappelant que le respect des règles de procédure est essentiel pour garantir l’impartialité d’un procès.
Le contexte politique tendu autour de cette affaire ajoute une couche supplémentaire de complexité. Pour de nombreux observateurs à Cotonou, le procès de Boko et Homeky n’est pas seulement une affaire judiciaire, mais aussi une manœuvre politique. L’implication de Olivier Boko et Oswald Homeky ces deux personnalités influentes, connues pour leur proximité avec les cercles de pouvoir, dans une affaire de « coup d’État » alimente les soupçons d’un règlement de comptes orchestré. La précipitation apparente de la CRIET, avec le rejet des demandes de nullité malgré des vices de procédure manifestes, renforce l’idée d’une justice instrumentalisée.
Ce cas n’est pas isolé. Le Bénin a récemment été marqué par d’autres procès où des figures de l’opposition, telles que Joël Aïvo ou Reckya Madougou, ont été condamnées dans des circonstances controversées. Ces affaires suivent un schéma similaire : des accusations graves, une procédure accélérée et des décisions perçues comme motivées par des considérations politiques. Cela reflète une tendance inquiétante qui mine l’État de droit et ébranle la confiance des citoyens dans le système judiciaire.
Les répercussions de cette affaire pourraient être profondes. Si la justice béninoise persiste à ignorer les droits de la défense et à se précipiter dans ses décisions, elle risque de perdre toute crédibilité, tant au niveau national qu’international. Me Ahounou a rappelé que l’instruction doit se faire « à charge et à décharge », avec une impartialité totale. Pourtant, dans ce dossier, la quête de vérité semble avoir été remplacée par une volonté de condamner coûte que coûte.
Les avocats de la défense appellent donc à une mobilisation de la société civile et de la communauté internationale pour surveiller de près le déroulement de cette affaire. Ils réclament également une réforme urgente des pratiques judiciaires au Bénin pour garantir des procès équitables conformes aux normes internationales. L’affaire Olivier Boko et Oswald Homeky est devenue un test décisif pour le système judiciaire béninois. La manière dont elle sera traitée déterminera si le pays peut encore revendiquer son statut d’État de droit ou s’il est en train de basculer dans un autoritarisme où la justice n’est qu’un instrument de répression politique.